Innovation avec la Toxine Butolique
Le Pr François Haab explique l’action de ce traitement présenté lors du dernier congrès mondial dans les cas d’hyperactivité de la vessie chez la femme.
Paris Match. Rappelez-nous les différentes formes d’incontinence féminine. Pr François Haab. 1. L’incontinence à l’effort due à une faiblesse du sphincter urinaire et qui survient par exemple lors d’un sport. 2. Celle liée à une hyperactivité de la vessie qui se contracte à n’importe quel moment du jour ou de la nuit.
Connaît-on les causes de ces dysfonctionnements ? L’incontinence à l’effort est habituellement la conséquence d’accouchements et du vieillissement qui entraînent un relâchement du sphincter. Quant à l’hyperactivité de la vessie, la perturbation peut être due à son mauvais fonctionnement neurologique ou à une hyperexcitation de sa paroi dont l’origine reste mal connue (liée parfois à un polype ou une petite infection). Dans la population générale, de 10 à 12 % des femmes, souffrent d’incontinence, dont 70 % ont plus de 70 ans.
Quels handicaps conduisent le plus souvent à consulter ? Les incontinences dues à une hyperactivité de la vessie altèrent considérablement la qualité de vie ! Ces femmes qui ne peuvent absolument plus contrôler la perte de leurs urines ont une vie sociale réduite. La nuit, les envies irrépressibles les obligent à se lever plusieurs fois, les exposant à un risque de chute. Et leur sommeil fragmenté entraîne une fatigue dans la journée.
Chez le médecin, est-ce un sujet délicat que les femmes ont du mal à aborder ? Aujourd’hui il l’est moins, mais nos patientes ne prononcent jamais le mot incontinence, elles disent : “J’ai un problème de vessie.”
Quels sont les traitements conventionnels pour la forme d’incontinence liée à l’hyperactivité de la vessie ? Habituellement, on administre en première intention des médicaments relaxants de la vessie qui diminuent son hyperexcitation. Ils sont prescrits seuls ou associés à une rééducation du muscle sphinctérien (exercices ou stimulation électrique). Ce traitement médical permet une nette amélioration dans les deux tiers des cas, mais il n’est pas dénué d’effets secondaires : bouche sèche, constipation et, parfois, certains troubles de la mémoire. Aux 30 % des malades résistant au traitement, on propose la mise en place d’un pacemaker de la vessie (un neuro-modulateur qui va réduire l’intensité de l’hyperactivité), nécessitant une intervention chirurgicale. La pile se recharge tous les sept ans et peut être enlevée à tout moment sans risque particulier.
En quoi consiste la dernière approche par toxine botulique ? Cette toxine, une substance synthétisée par une bactérie, a la propriété de diminuer l’excitation musculaire, ce qui explique ses multiples indications. Récemment, on a découvert qu’on pouvait aussi l’utiliser pour traiter l’hyperactivité de la vessie en y introduisant directement le produit (le médecin effectue une anesthésie locale avant les injections de toxine). L’hyperexcitabilité de la vessie diminue quatre à six jours après la séance. La patiente reste soulagée six à neuf mois, durant lesquels elle reprend une vie normale. A la réapparition des symptômes, le traitement peut être renouvelé.
Quels sont les risques de ces injections ? Les suites ne sont pas douloureuses. Le seul risque, mais totalement réversible, est une paralysie transitoire de quelques semaines de la vessie (dans 5 % des cas), ce qui nécessitera de diminuer la dose lors d’une prochaine séance d’injections. Durant cette période, on éduque la patiente à évacuer sa vessie à l’aide d’une sonde qu’elle introduit et retire elle-même plusieurs fois par jour. C’est fastidieux, mais facile.
Quelles études ont montré l’efficacité de cette nouvelle méthode ? Plusieurs ont été simultanément mises en route en Europe et aux Etats-Unis il y a deux ans sur plus de 500 patientes. Plus de 80 % d’entre elles ont été considérablement soulagées, sans subir d’effets secondaires, durant six à neuf mois. Toutes les études ont montré les mêmes résultats. Ce traitement est déjà couramment utilisé aux Etats-Unis, en Allemagne, en Espagne ou en Suède…
* Chef du service d’urologie à l’hôpital Tenon (Paris).
source : parismatch.com